Joyce Carol Oates : Les chutes

4ème de couverture :
Au matin de sa nuit de noces, Ariah Littrell découvre que son époux s’est jeté dans les chutes du Niagara. Durant sept jours et sept nuits, elle erre au bord du gouffre, à la recherche de son destin brisé. Celle que l’on surnomme désormais la « Veuve blanche des Chutes » attire pourtant l’attention d’un brillant avocat. Une passion aussi improbable qu’absolue les entraîne, mais la malédiction rôde…

 

Ce que j’aime chez Joyce Caroll Oates, c’est son écriture, tout en finesse et en subtilité ponctuée par des phrases courtes et percutantes, et sa façon de brosser par petites touches la psychologie de ses personnages. Dès le début du roman, Joyce Caroll Oates nous captive par son univers brumeux et mystérieux, ses personnages charismatiques et son intrigue de grande qualité. La psychologie des personnages est très fine, elle excelle à décrire leur désespoir, leurs incompréhensions et leur déchéance… Qu’ils aient ou non un rôle de premier plan dans “Les Chutes”, la vingtaine de protagonistes semblent à tour de rôle s’imbriquer naturellement dans l’intrigue au demeurant palpitante sur fond de scandale écologique. En effet, un roman écologique aussi, puisqu’il revient sur les méthodes peu scrupuleuses des pouvoirs pour garantir l’expansion industrielle dans ce coin des Etats Unis.
En parallèle des Chutes « géographiques », apparaissent des chutes « sociales » : Ariah (une femme bouleversée, névrosée, mais fière, digne) et ses trois enfants se trouvent subitement sans ressource. Pour leur père, c’est à eux que revient la lourde tâche de comprendre ce qu’il s’est passé pour pouvoir ainsi faire un trait sur leurs passés. Meurtre ? accident ? trahison ? Damnation ?

Quelques passages marquants :
« –  « Une vie meilleure grâce à la chimie ». J’ai toujours pris ces salopards pour ce qu’ils sont. Je ne suis pas dupe de leur tactique de communication. Ils fabriqueraient encore du napalm si quelqu’un les payait pour et, à quelques kilomètres de ce bureau, leurs « chercheurs » travaillent en cet instant même à la mise au point d’armes biologiques. Vous enseignez cela à La Salle, Chandler ? Eh bien, ce serait peut-être une bonne idée, puisque les sciences sont votre matière… Si je crois que Dirk Burnaby s’est suicidé ? Non. Qu’il est mort dans un « accident » ? Non. Ces salopards l’ont tué. Mais vous ne le prouverez jamais. »
« – Il nous arrive à tous d’avoir envie de mourir lorsque l’effort de vivre nous épuise, mais cela ne dure pas. Comme le temps. Nous sommes comme le temps. Vous voyez le ciel? Ces nuages? Ils passent. Entre deux lacs, comme ici, tout finit par passer. Non ?

C’était l’optimisme le plus banal qui soit. On aurait pu lire ça sur des boîtes de corn-flakes… Pourtant Chandler croyait à ces mots, il aurait misé sa vie sur eux. »
« – « Mais Dirk Burnaby et moi n’avons pas part à cette honte, vous voyez. Nous nous aimons et nous ne voyons aucune raison de feindre le contraire. Et, surtout, nous ne voyons aucune raison de prétendre que notre conduite privée regarde quelqu’un d’autre que nous . » »
« – Elle s’émerveillait d’avoir retenu, dans ces bras-là, un homme aussi remarquable. Mais elle était humble, aussi. Peut-être même avait-elle peur. Car elle savait d’expérience que Dieu (en qui elle ne croyait pas, du moins pas pendant la journée) pouvait le lui reprendre à tout moment.  »
« – « Quasi indigents », c’est ainsi qu’elle nous décrivait. Nous grandirions accrochés à cette phrase mystérieuse sans savoir précisément ce qu’elle voulait dire. Sinon que quasi indigents était un état permanent, peut-être un état spirituel, qui nous était particulier. A nous, les enfants Burnaby, orphelins de père. »

 

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